Cannabis et troubles de l’attention (TDAH) : le potentiel du CBD et du THC pour améliorer la concentration

Comprendre le TDAH : un trouble neurodéveloppemental fréquent

Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est une affection neurologique qui touche des millions de personnes dans le monde. Il se manifeste par des symptômes tels que l’inattention, l’impulsivité et, dans certains cas, l’hyperactivité. Le TDAH est généralement diagnostiqué durant l’enfance, mais il peut persister à l’âge adulte avec des répercussions importantes sur la vie quotidienne, académique, professionnelle et sociale.

Selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5), publié par l’American Psychiatric Association, le diagnostic du TDAH dépend de critères cliniques précis. En Europe, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe également ce trouble sous les “troubles du développement psychologique”. En France, le TDAH est reconnu comme une affection de longue durée (ALD) dans certains cas, permettant une prise en charge adaptée par l’Assurance Maladie.

Traitement conventionnel du TDAH : limites et alternatives

Le traitement conventionnel du TDAH repose principalement sur :

  • La médication stimulante, comme le méthylphénidate (ex. : Ritaline®), qui agit sur les neurotransmetteurs dopaminergiques et noradrénergiques.
  • La thérapie comportementale et cognitive (TCC).
  • Des stratégies éducatives et environnementales adaptées.

Cependant, de nombreux patients rapportent des effets secondaires indésirables liés aux médicaments : insomnie, perte d’appétit, sautes d’humeur, voire dans certains cas dépendance. De plus, l’accès au traitement peut s’avérer complexe en raison de la stigmatisation persistante autour du trouble et des médicaments psychostimulants. Ces limites ont conduit certains patients et chercheurs à se pencher sur des alternatives naturelles, notamment les cannabinoïdes comme le cannabidiol (CBD) et le tétrahydrocannabinol (THC).

Le système endocannabinoïde et sa relation avec le TDAH

Le système endocannabinoïde (SEC) est un réseau de récepteurs présents dans le cerveau et dans le corps, jouant un rôle clé dans la régulation de l’humeur, de l’attention, de la mémoire et de la motivation. Les deux récepteurs principaux sont :

  • CB1, situé majoritairement dans le système nerveux central.
  • CB2, principalement lié au système immunitaire.
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Des études suggèrent que le SEC pourrait être impliqué dans les mécanismes neurobiologiques du TDAH. Un déséquilibre dans ce réseau pourrait contribuer aux troubles de la régulation de l’attention et de l’impulsivité. Les cannabinoïdes, en interagissant avec ces récepteurs, pourraient donc agir sur certains symptômes du TDAH.

CBD et TDAH : un intérêt thérapeutique croissant

Le cannabidiol (CBD) est une molécule non psychoactive présente dans la plante de cannabis. Contrairement au THC, il ne provoque pas de sensation d’euphorie ou d’altération cognitive. Ses propriétés anxiolytiques, anti-inflammatoires et neuroprotectrices en font un candidat prometteur pour gérer certaines manifestations du TDAH, notamment :

  • La diminution de l’anxiété, qui exacerbe souvent les symptômes d’inattention.
  • L’amélioration du sommeil, souvent perturbé chez les personnes atteintes de TDAH.
  • La réduction de l’impulsivité et de l’agitation mentale.

Une étude publiée en 2017 dans le Journal of Psychopharmacology a évalué l’effet d’un extrait de cannabis à base de CBD sur 30 adultes atteints de TDAH. Les résultats ont montré une amélioration légère de la concentration et une réduction de l’hyperactivité, bien que les auteurs soulignent le besoin d’essais cliniques plus robustes pour confirmer ces observations (Solowij et al., 2017).

THC et TDAH : fonction cognitive et controverse

Le THC est la substance psychoactive majeure du cannabis. Il agit principalement sur les récepteurs CB1 du cerveau. Chez certaines personnes atteintes de TDAH, le THC pourrait améliorer la concentration à faibles doses, en régulant certaines activités neurochimiques impliquées dans l’attention et la mémoire à court terme. Certains adultes rapportent se sentir plus « centrés » ou calmes après la consommation de petites quantités de THC.

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Néanmoins, l’utilisation du THC dans un cadre thérapeutique est controversée. À doses élevées, il peut altérer la mémoire, ralentir les réflexes et provoquer de l’anxiété ou de la paranoïa. De plus, il existe un risque de dépendance psychologique. Les effets varient fortement en fonction du dosage, de la tolérance individuelle et du mode de consommation.

Les autorités sanitaires françaises rappellent que le THC est une substance classée comme stupéfiant (Article R.5132-86 du Code de la santé publique) sauf dans le cadre d’un usage médical strictement encadré, comme pour le produit autorisé Marinol® ou dans le programme d’expérimentation du cannabis médical lancé en France en 2021 (selon l’arrêté du 7 octobre 2020 relatif à l’expérimentation du cannabis à usage médical publié au Journal officiel).

CBD, THC et synergie dans l’amélioration de la concentration

Des recherches récentes suggèrent qu’une synergie (« effet d’entourage ») entre CBD et THC pourrait moduler leurs effets respectifs. Le CBD atténue les effets psychoactifs du THC, tout en amplifiant certaines de ses propriétés thérapeutiques. Dans le cas du TDAH, une formulation contenant un ratio précis de CBD/THC pourrait offrir un meilleur équilibre entre amélioration de la concentration et réduction de l’anxiété, tout en limitant les effets secondaires cognitifs du THC.

Des produits médicinaux comme le Sativex® (disponible dans certains pays européens) en sont un exemple, combinant CBD et THC en doses équilibrées. Toutefois, leur usage doit toujours être guidé par un professionnel de santé et rester conforme aux législations locales.

Cadre légal du CBD et du THC en France

En France, depuis l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne en novembre 2020 (Affaire C-663/18), le CBD ne peut pas être considéré comme un stupéfiant s’il est extrait de variétés de chanvre autorisées (<1 % de THC). Le décret du 30 décembre 2021 (Décret n° 2021-1749) encadre la commercialisation des extraits de chanvre, autorisant notamment la vente de produits contenant du CBD.

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En revanche, le THC reste strictement interdit sauf dans le cadre médical ou expérimental. La possession, la consommation ou la vente de cannabis contenant du THC en dehors de ces cadres constitue une infraction pénale.

Perspectives thérapeutiques : vers une reconnaissance ?

Le recours aux cannabinoïdes dans la prise en charge du TDAH ouvre de nouvelles perspectives. Si le CBD se montre prometteur pour améliorer la concentration, l’impulsivité et l’anxiété, des recherches scientifiques rigoureuses sont encore nécessaires pour valider son efficacité et établir des protocoles standardisés. Le THC, bien que potentiellement utile chez certains patients adultes, doit être utilisé avec prudence et sous supervision médicale.

À l’avenir, des formulations à base de phytocannabinoïdes pourraient venir compléter les traitements existants, dans le cadre d’une approche thérapeutique intégrative. En attendant, toute consommation à visée thérapeutique doit être encadrée par un professionnel de santé, et respecter les lois en vigueur.

Les personnes souffrant de TDAH intéressées par les alternatives naturelles doivent s’informer de manière rigoureuse et consulter un spécialiste avant d’envisager tout changement de traitement ou d’introduction de cannabinoïdes dans leur routine de soins.